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L’exercice pluriprofessionnel aux forceps 


Table matières

    proposition de loi portant sur l’amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé

    L’approche des soins centrés sur la personne recouvre, au delà du strict état de santé, le bien-être physique, mental et social. L’objectif est de prodiguer des soins aux personnes dans leur globalité, en fonction de leurs besoins de santé tout au long de leur vie, et non pas simplement de traiter certaines maladies.

    Diversifier les portes d’entrée du système de santé n’est pas créer un système à deux vitesses, mais bien de proposer une offre de soins globale et collective : le bon professionnel, au bon endroit, au bon moment. Patients, professionnels de santé, décideurs, avançons ensemble.

    Les député(e)s ont voté favorablement le 19 janvier

    La députée de la majorité Stéphanie Rist, rhumatologue de profession, a vu voter sa proposition de loi portant sur l’amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé à l’unanimité le 19 janvier 2022.

    [Ce texte, contesté par l’ensemble des syndicats médicaux, sera examiné par les sénateurs le 14 février.]   

    Le gouvernement, comme le Sénat reculent

    « En quelques heures de débat parlementaire, la transformation urgente de l’organisation des soins a été renvoyée à plus tard. Une fois de plus. Une fois de trop. » 

    Les soignants : Infirmiers, pharmaciens, kinés, orthophonistes, podologues, biologistes, orthoptistes, audioprothésistes, mais aussi l’association d’usagers France Assos Santé regrettent que la proposition de loi déposée par la députée (Renaissance) du Loiret – ouvrant l’accès direct aux infirmières de pratique avancée (IPA) aux kinés et aux orthophonistes – ait été « vidée de son contenu initial » au Sénat. Un « coup d’épée dans l’eau ».

    La référence du texte initial aux Communautés Professionnelles Territoriales de Santé pour l’accès direct aux paramédicaux, était jugée trop large ou trop lointaine pour assurer une bonne coordination avec le médecin, notamment par MG France. Ainsi, le texte adopté au Palais du Luxembourg restreint l’accès direct à « des formes plus intégrées de coopération que sont les Maisons de Santé Pluriprofessionnelles, les centres de santé et les équipes de soins primaires et spécialisés ».

    Autre reculade, le retrait de la proposition de loi sur l’accès aux soins du député Frédéric Valletoux (Horizons) qui créait le nouveau statut d’infirmier référent. 

    Pourquoi, alors qu’entre la crise des urgences, la désertification médicale et le vieillissement de la population, « le tsunami sanitaire susceptible de submerger notre système de santé a commencé à déferler » une telle attitude ?

    Les syndicats des professions de santé à la manoeuvre

    près de 10 000 médecins sont descendus dans les rues de la capitale le 14 février pour protester contre la loi Rist.

    Les présidents de huit syndicats de professionnels de santé et d’une association de patients regrettent, dans une tribune au « Monde », que le gouvernement et les parlementaires aient détricoté la proposition de loi Rist, qui visait à lutter contre les déserts médicaux et à améliorer la prise en charge.

    Les syndicats médicaux sont opposés à ce texte

    Les syndicats médicaux sont opposés à ce texte qui instaure un accès direct aux Infirmièr(e)s en Pratique Avancée, aux masseurs-masseuses-kinésithérapeutes et aux orthophonistes.

    Ils alertent sur le risque d’une médecine à plusieurs vitesses — celle des vrais médecins et celle des officiers de santé — par une volonté de contourner le rôle du médecin généraliste traitant dans le parcours de soins. L’accès direct à des non-médecins pour établir un diagnostic médical et prescrire un traitement médical est une insulte pour notre profession qui nécessite 9 à 15 ans d’études et un danger pour les patients. « On ne dit pas du tout que les autres professionnels sont moins compétents, ce n’est pas la question, mais chacun a son domaine de compétences et son cadre de travail. Ce qui nous a fâchés, c’est aussi de voir que l’on considère notre métier comme une succession de petits actes délégables. Or nous, médecins généralistes traitants, sommes des spécialistes de la prise en charge globale. Nous prenons en compte le côté somatique du patient, sa trajectoire de vie, sa culture, son environnement, son psychisme. Aujourd’hui, le politique ne comprend pas que ce qui fait notre spécificité, ce n’est pas de savoir si on pique ou on ne pique pas, mais de tenir compte de l’ensemble de ces problématiques… »

    huit syndicats de professionnels de santé et d’une association de patients y voient une avancée majeure

    Selon les projections de l’Institut National de la Statistique et des Études Économiques, les personnes âgées de plus de 75 ans représentent 6,8 millions de personnes en 2023, et avant la fin de la décennie actuelle un tiers de la population française sera âgée de plus de 60 ans. Déjà, le vieillissement de la population et la transformation des besoins accentuent les difficultés d’accès aux soins liées à la crise des urgences hospitalières et aux déserts médicaux. Plus de six millions de patients n’ont pas accès à un médecin traitant, dont plus de 600 000 sont en affection longue durée. Faire face à cette situation représente un défi de taille et une urgence vitale pour notre pays.

    Ces dernières années, les professionnels de santé paramédicaux se sont préparés à relever ce défi. Leur niveau de formation a été augmenté de manière significative. Malgré cela, leurs compétences propres ne sont pas pleinement mobilisées, alors qu’ils sont capables de répondre à de nombreux besoins en améliorant souvent la rapidité de la prise en charge au bon niveau. De même, l’apport des assistants médicaux, assistants dentaires, préparateurs en pharmacie, techniciens de laboratoires peut augmenter le nombre de prises en charge par une organisation améliorée du travail des professionnels médicaux qui les emploient.

    le président de la République a appelé à une prise en charge plus collective des patients. Rien n’est plus évident que la nécessité de recentrer la ressource médicale, devenue rare, sur les cas les plus complexes, en déléguant tout ce qui peut l’être. Les autres professions de santé y sont prêtes.

    Tous, nous pensons que le médecin doit être le garant du parcours de soins du patient ; personne ne songe à le remplacer. Il s’agit seulement d’utiliser pleinement les compétences de chacun. Cela permettrait de mieux répartir la charge entre les professionnels de santé et de garantir une réponse adaptée à chaque patient. D’autant que, avec la mise en œuvre du dossier médical numérique du patient, il n’existe plus aucun obstacle à la coordination des soins.

    C’est ensemble que nous devons apporter une réponse aux difficultés d’accès aux soins des patients !

    Les signataires : Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France ; François Blanchecotte, président du syndicat des biologistes ; David Boudet, président de la Fédération nationale des podologues ; Sarah Degiovani, présidente de la Fédération nationale des orthophonistes ; Luis Godinho, vice-président du syndicat des audioprothésistes ; Sébastien Guerard, président de la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs ; Daniel Guillerm, président de la Fédération nationale des infirmiers ; Mélanie Ordines, présidente du Syndicat national autonome des orthoptistes ; Gérard Raymond, président de France Assos Santé, l’union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé.

    Une déclaration de guerre

    Les médecins voient dans les arguments de la député, une véritable déclaration de guerre. « La nécessité d’avancer sur un repositionnement des professionnel(e)s, que ce soit pour un enjeu d’attractivité et de fidélisation des soignants, ou pour l’enjeu primordial de l’accès aux soins. L’offre de soins médicaux étant insuffisante par rapport aux besoins de la population, il est indispensable de trouver des solutions à très court terme. À cet égard, les protocoles de coopération et le développement de la pratique avancée semblent être les réponses les plus appropriées. »

    Ils répondent que ce texte fait fausse route. « Cette ‘fausse bonne idée’ entraînerait un désengagement des médecins, en particulier de la jeune génération, et une incompréhension de la population qui ne souhaite pas voir le système de santé français tomber au plus bas de l’échelle européenne…Une loi qui sonne le glas. »

    Un amendement adopté vise à « renforcer l’accès aux soins de tous en reconnaissant dans les négociations conventionnelles avec l’assurance maladie, les engagements des médecins qui s’investissent en ce sens en confiant aux partenaires conventionnels le soin de définir les modalités de l’engagement territorial des médecins afin de définir les modalités appropriées de reconnaissance et de valorisation de ces professionnels qui s’engagent en faveur de la coopération, l’accès aux soins de proximité, aux soins non programmés, avec des pratiques tarifaires maitrisées et en participant aux actions de santé, notamment l’exercice coordonné, au bénéfice de la population de leur territoire au-delà de leur patientèle propre. »

    Enfin, les syndicats de médecins ont claqué la porte des négociations conventionnelles. “C’est un mépris pour le processus conventionnel. Alors qu’on est autour de la table en train d’essayer de trouver des voies et passages, le Gouvernement sort de son chapeau un amendement qui porte précisément sur le cadrage des négociations avec les médecins, alors que la PPL Rist ne portait pas là-dessus !… Non seulement on ne nous entend pas mais on charge la barque. Ça sert à quoi qu’on discute ?… Le Parlement aura réussi à créer une union syndicale de médecins. »

    Élargissement des compétences

    Deux types d’IPA, spécialisés et praticien, avec des modalités d’exercice différents sont créés. Un amendement autorise les infirmièr(e)s formé(e)s, dans le cadre d’un exercice coordonné, à prendre en charge la prévention et le traitement de plaies comprenant la prescription d’examens complémentaires et de produits de santé. Les résultats des examens complémentaires et le compte-rendu des soins devront être “systématiquement” transmis au médecin traitant.

    L’accès direct aux kinés, dans le cadre d’un exercice coordonné, se fera selon les mêmes définitions que pour les IPA. Le kiné pourra, prioritairement pour les patient(e)s en Affection de Longue Durée, pratiquer 10 séances en accès direct, sans prescription, dans le cas où le patient n’a pas eu de diagnostic médical préalable ; prescrire une activité physique adaptée (APA) aux patient(e)s éligibles ; transmettre systématiquement un bilan et un compte-rendu au médecin ainsi qu’au patient ou à la patiente.

    Le texte donne un accès direct aux orthophonistes dans le cadre d’un exercice coordonné.

    Les compétences sont élargies pour les assistants dentaires, via la création de l’assistant dentaire de niveau 2 ; pour les pédicures-podologues par la prescription des orthèses plantaires, de séances de soins de prévention adaptées, la gradation du risque podologique des patients diabétiques.

    Les pharmacien(ne)s pourront renouveler jusqu’à 3 mois les ordonnances de traitements chroniques.

    Une expérimentation de 18 mois dans 5 départements autorise les pharmacien(ne)s biologistes à dépister le cancer du col de l’utérus.

    Les assistant(e)s de régulation médicale sont reconnus comme professionnels de santé.

    La référence aux CPTS a été supprimée par les sénateurs. La CPTS était jugée trop large ou trop lointaine pour assurer une bonne coordination avec le médecin, notamment par MG France. Le texte adopté au Palais du Luxembourg restreint l’accès direct aux formes de coopération aux maisons de santé pluriprofessionnelles, aux centres de santé et aux équipes de soins primaires et spécialisés.

    Élargissement de la permanence des soins

    Un amendement gouvernemental constatant que la permanence des soins ambulatoires par les médecins ne permet pas de garantir une couverture complète de tout le territoire, introduit la notion d’une “responsabilité collective” de participation à la permanence des soins, “tant en établissement de santé qu’en ville”. Il élargit aux chirurgiens-dentistes, sages-femmes et infirmiers diplômés d’Etat, les services d’accès aux soins qui n’ont pas vocation à être prises en charge par un médecin, dans le strict respect des compétences de chacun.


    Sources :

    https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b0362_proposition-loi#

    https://www.egora.fr/actus-pro/acces-aux-soins/78579-une-declaration-de-guerre-les-medecins-liberaux-vent-debout-contre-l

    https://www.egora.fr/actus-pro/conditions-d-exercice/77355-si-on-imagine-qu-un-pharmacien-un-kine-et-une-infirmiere-font

    https://www.egora.fr/actus-pro/syndicalisme/78712-on-ne-veut-pas-avoir-la-double-peine-les-syndicats-de-medecins-claquent

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/02/28/acces-aux-soins-les-competences-propres-des-professionnels-de-sante-paramedicaux-ne-sont-pas-pleinement-mobilisees_6163639_3232.html#xtor=AL-32280270-%5Bdefault%5D-%5Bios%5D

    modifié le 2023-03-06 14:55 par admin


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